Pourquoi l'épidémie de COVID-19 repart dans notre département. Il y a des trous énormes dans le dispositif de prévention.

Publié le par M.E.

A force d'adopter à différents niveaux une attitude "hospitalo-centrée", l'Etat néglige la prévention des citoyens en ignorant de nombreux lieux et configurations propices à la contamination dans la vie quotidienne.

Source : La Voix du Nord, 4 août 2020

1. Pour des raisons que l'on peut imaginer, l'Etat et les élus locaux ignorent la réalité du comportement des clients, souvent jeunes dans les bars et restaurants. Des tablées immenses, l'absence d'une distance suffisante entre les tables est propice à la création de foyers de contamination ("clusters").

Jeunes agglutinés dans un bar de Lille

En outre, pour aggraver le constat, certains bars se substituent aux boites de nuit (qui ne peuvent actuellement rouvrir) dans l'animation nocturne avec un respect des mesures sanitaires très perfectible.

Soirée dansante dans un bar

Les spécialistes d'infectiologie sont unanimes à constater que cette population jeune laisse circuler librement le virus, qui ne laisse pas souvent de symptômes chez cette population. Mais cette dernière devient une source très active de contamination pour des populations plus fragiles que ces jeunes vont inévitablement, tôt ou tard, côtoyer. D'autres jeunes vont garder des séquelles durables

2. Le législateur a complètement laissé de côté les immeubles d'habitation collective qui offrent des opportunités de contamination dans les parties communes souvent mal aérées : escaliers, cabines d'ascenseur, couloirs, locaux des ordures, etc…

3. Par période de forte chaleur et de vent très faible, de nombreuses rues se comportent en "canyon" et l'affluence peut y être importante et la contamination devient donc possible.

4. Le port du masque exige un minimum de rigueur. Or certaines personnes même dans des lieux clos le portent sous le menton ou sans réel ajustement au niveau du nez.

Au sein d'une librairie du centre de Lille

J'ai constaté que certains commerçants ou serveurs de bars ne portaient pas de masque en servant des clients.

5. On voit aussi des commerçants qui remplacent le masque par une visière en plexiglas et cette dernière n'est ni une protection réelle pour le porteur, ni un barrage à l'émission de micro-gouttelettes ou d'aérosols venant de celui-ci [1]

J'ai vu dans un salon de coiffure, une coiffeuse portant une mini-visière seulement devant la bouche et bien sûr étant à très faible distance de sa cliente, elle masquée.

A lire aussi ce témoignage paru dans la Voix du Nord du 1er août 2020 : "J’arrive l’autre jour chez mon coiffeur habituel et je constate que plusieurs client(e)s ne portent pas de masque, que ceux du personnel sont pour la plupart portés sous le nez, voire retirés pour parler, que la distanciation n’est plus vraiment respectée tandis que, forcément, les sèche-cheveux brassent allègrement l’air du salon, sain ou vicié. Je n’ai vu aucune désinfection de fauteuil ou matériel. Bref, on était loin des mesures « obligatoires » dans les salons de coiffure et d’ailleurs toujours affichées à l’entrée…"

6. Dans les cinémas, alors que la grande proximité est une réalité entre les spectateurs assis, même si la distance (faible) d'un mètre doit être respectée, le port du masque pendant la projection n'est toujours pas rendu obligatoire, ce qui choque la majorité des médecins infectiologues.

7. Dans les trains, les passagers restent souvent longtemps côte à côte, quelquefois entassés, pendant un trajet et, avec une ventilation loin d'être au même niveau que celle des avions de transport [2].

Dans un train SNCF en juillet 2020

Je ne suis pas convaincu dans ce cas par la protection offerte par des masques grands public ou en tissu plus ou moins de bonne qualité et donc plus ou moins filtrants. Les masques de norme FFP2 devraient être obligatoire, car il n'y a pas de distanciation physique suffisante, ni de ventilation suffisante.

8. Quant au monde du travail, chacun connaît les énormes disparités entre les secteurs d'activité et la différence de qualité des politiques de prévention en santé et sécurité au travail. Le secteur du BTP a toujours gardé la palme du secteur le plus accidentogène. Lorsqu'on circule dans notre ville, on s'aperçoit vite que des mesures élémentaires ne sont pas respectées sur des chantiers comme par exemple le port de protection oculaire et respiratoire, la protection auditive dans le cas d'opérations provoquant énormément de poussières : meulage ou sciage de dalles ou de pavés. Ce laxisme dans l'application de mesure de prévention ne peut que se poursuivre dans le cas du COVID-19.

9. Enfin la distanciation physique de 1 mètre seulement est jugé très insuffisante par les spécialistes. Dans la plupart des pays voisins, celle-ci a été fixée à 1,50 m et dans d'autres à 2 m. Ces dernières valeurs sont cohérentes avec un risque acceptable compte-tenu de l'état des connaissances actuelles sur la durée de vie d'un aérosol de COVID-19 dans un espace clos ou ouvert et mal aéré.

Voila quelques points qui montrent l'incomplétude du dispositif de prévention actuel.

Le recensement fait des points oubliés n'a pas la prétention d'être exhaustif.

Une autre interrogation importante demeure : qui a la charge de faire respecter les mesures barrière dont la distanciation physique et le port du masque ? Est-ce la police nationale ? Est-ce les maires avec leur police municipale ? Si oui, donnera-t-on les moyens à ceux-ci pour le faire ?

Tout cela est loin d'être clair pour le grand public et peut-être même pour ceux qui seraient en-charge de faire respecter les mesures préventives !

M.E.

[1] Dernières confirmations concernant les moyens de protection face au COVID-19 http://www.vigieecolo.fr/2020/07/dernieres-confirmations-concernant-les-moyens-de-protection.html

[2] Déconfinement : l'air dans les trains est-il moins pur que dans les avions ? http://www.vigieecolo.fr/2020/06/deconfinement-l-air-dans-les-trains-est-il-moins-pur-que-dans-les-avions.html

 

 

Publié dans COVID-19, Santé

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