Responsable de la pollution de l’Escaut, le sucrier Tereos condamné à verser plus de 9 millions d’euros
La multinationale française a été condamnée jeudi par le tribunal correctionnel de Lille, après que la rupture d’une digue en 2020 a lourdement pollué le fleuve.
Le géant sucrier Tereos, propriétaire de la marque Béghin-Say, a été condamné jeudi 12 janvier à Lille à 500 000 euros d’amende et à plus de 9 millions de dommages et intérêts pour avoir pollué l’Escaut en 2020, provoquant la mort de plusieurs millions de poissons.
La région wallonne touchera notamment 8,86 millions d’euros au titre du « préjudice écologique », a décidé le tribunal correctionnel, qui reconnaît la « négligence » du groupe dans l’entretien d’une digue, qui avait cédé et entraîné la pollution du fleuve.
« Nous sommes évidemment satisfaits de la sévérité de la sanction », a réagi Corinne Lepage, avocate de la région de Wallonie, qui réclamait 17 millions d’euros. « Je suis, pour ma part, satisfaite de voir que le préjudice écologique est une fois de plus reconnu et indemnisé », a ajouté l’ancienne ministre de l’environnement.
« La décision peut apparaître sévère effectivement a priori », mais « sur le montant » alloué aux parties civiles, « c’est très inférieur aux demandes qui ont été faites », a rappelé l’avocat de Tereos, Alexandre Moustardier.
L’amende est conforme aux réquisitions du parquet lors de l’audience de la mi-novembre. Mais l’obligation de « réparer les dommages » environnementaux provoqués, également réclamée, n’a pas été retenue, un arrêté préfectoral d’août 2021 prescrivant déjà à Tereos des mesures de réparation écologique de l’Escaut.
« Il y a eu des négligences, des imprudences, un non-respect de la réglementation », qui ont « contribué à aggraver le risque d’accident », avait relevé le substitut du procureur Florian Pappo, pour qui « il faudra des années » pour réparer les dégâts.
Dans la nuit du 9 au 10 avril 2020, la rupture d’une digue de l’usine Tereos d’Escaudœuvres (Nord), qui retenait les eaux de lavage de betteraves, avait entraîné le déversement de 100 000 mètres cubes de liquide noirâtre, essentiellement des matières organiques, notamment dans l’Escaut, qui traverse la France, la Belgique et les Pays-Bas.
Des millions de poissons étaient morts, l’enquête concluant à la « diminution de 50 % du nombre d’espèces et 90 % des effectifs ». C’est « la pollution la plus importante qu’ait connue l’Escaut depuis plus d’un siècle », s’était insurgée Corinne Lepage au moment de l’audience.
Me Moustardier, avait, pour sa part, évoqué « une chaîne de responsabilités ou des multiresponsabilités » d’acteurs publics et privés. Selon lui, le bureau d’études Antea Group, chargé de contrôler les bassins, n’avait pas souligné l’urgence d’une intervention. L’avocat avait aussi mis en avant un « défaut d’encadrement administratif », avant l’accident, des installations mises en cause.