Enquête publique sur projet immobilier Saint-Sauveur : Communiqué inter-associatif du 7 juin 2018

Publié le par M.E.

 

Un feu orange et certainement pas un feu vert !

Le 19 avril dernier, veille de la clôture de l'Enquête publique, les associations Entrelianes, A.S.P.I.(Association pour la Suppression des Pollutions Industrielles), Les Amis de la Terre, Nord Ecologie Conseil et le collectif "Fête La Friche" tenaient une conférence de presse pour lancer une mise en garde : avec le projet d'urbanisation de Saint-Sauveur, Lille sacrifie son dernier espace de nature possible et menace la santé de ses habitants avec notamment des risques de pollution de l'air et de l'eau sous-évalués voire non pris en compte dans l'étude d'impact.

Si les promoteurs du projet semblent ne pas avoir entendu ces objections, pourtant soigneusement étayées, on ne peut en dire autant du Commissaire enquêteur nommé sur le dossier. En effet, dans son rapport rendu le 30 mai, celui-ci assortit son avis favorable de trois réserves majeures. Ainsi, il demande expressément (p.44 du mémoire conclusif) :

- premièrement, de procéder à de nouvelles simulations et mesures de la pollution de l’air et du trafic automobile, tenant mieux compte des réalités observées (par exemple l'augmentation constatée à Lille des déplacements en voiture alors que l'étude d'impact fait à tort l'hypothèse de déplacements en baisse) et de confronter les résultats obtenus à des normes exigeantes, celles de l'OMS ;
- deuxièmement, concernant les risques de pollution de l'eau engendrés par le projet de piscine sur le Belvédère, de vérifier « l’absence de risques de pollution de la nappe du carbonifère, dont la vulnérabilité n'a – a priori – pas été évaluée » ;
- troisièmement, concernant la piscine toujours, de saisir l'Agence Régionale de Santé pour obtenir son avis concernant la localisation de la piscine, ce qui souligne les risques d'exposition à un air pollué pour les futurs usagers.

Le Commissaire conseille de différer la déclaration d’intérêt général et de mise en compatibilité du PLU (délibération qui devait être votée au prochain conseil de la MEL le 15 juin prochain), tant que ces réserves n'ont pas été levées. Il souligne aussi, à raison, les enjeux juridiques associés si la MEL décidait de passer outre ces réserves en votant une telle délibération dans ces conditions, ce qui ouvrirait la voie à "un recours futur basé sur le principe de précaution". Notons également que dans ses conclusions, le Commissaire enquêteur recommande "au Conseil Métropolitain d’étudier toutes les possibilités d’augmenter encore la part de la nature sur celle des constructions".

On ne peut donc que s'étonner que les promoteurs du projet, et en premier lieu Stanislas Dendievel, adjoint à l'urbanisme de la Ville de Lille, aient lu ce rapport comme une bénédiction papale donnant le « feu vert pour l'aménagement de la friche Saint-Sauveur » : le feu est au mieux orange, et le griller comporte le risque non négligeable de se faire arrêter en plein carrefour. Inutile de préciser que les sifflets sont prêts…

Pour notre part, nous regrettons que ces réserves majeures, qui reprennent point par point celles avancées par la « minorité radicalisée et organisée » des opposants au projet, ainsi que la qualifie Stanislas Dendievel, n'aient pas conduit le Commissaire enquêteur à poser un feu rouge plutôt qu'un feu orange. Que se passera-t-il si les normes de l'OMS ne sont pas respectées avec ces nouvelles simulations ? Le rapport du Commissaire enquêteur ne le précise pas mais demande expressément qu'elles le soient, ce qui suggère une redéfinition du projet.

Car au-delà de ce rapport, qui n'est qu'une étape parmi d'autres pour un projet dont les grandes lignes ont été fixées il y a bientôt dix ans, soit avant les accords de Paris et avant la prise de conscience massive des enjeux climatiques, force est de constater que son contenu et ses valeurs sont dans la continuité des 19ème et 20ème siècles au lieu de marquer la rupture appelée par les problématiques propres au 21ème. En effet, avec ce projet immobilier, on tourne le dos à la profonde révolution qui partout dans le monde impose à l'urbanisme de nouvelles orientations, caractérisées par une volonté de prise en compte du besoin d'espaces verts chez les urbains, de protection et de développement de la biodiversité, de reconfiguration des espaces réservés à la voiture au profit de la marche, du vélo et des transports publics.

Cette bétonisation des derniers espaces de nature disponibles, cette recherche incessante de nouveaux sols à construire ont des effets irréversibles, ce qui est très grave et conduira à une impasse qui s'ajoute à l'impasse résultant de l'inaction des autorités de l'Etat et des élus lillois et métropolitains face aux pollutions.

Amis de la Terre - ASPI - Entrelianes – Fête la Friche - Nord Ecologie Conseil.

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