Aires marines protégées : la France doit-elle apprendre du Royaume-Uni ?
Depuis la fin mars, le Royaume-Uni interdit la pêche de fond dans plusieurs aires marines protégées – mesure prise comme un affront par la France. Félix Gouty et Laurent Radisson, journalistes chargés du dossier, mettent cette situation en perspective.
Protéger la biodiversité en mer n'est pas une simple affaire de conservation. Cela peut vite tourner au conflit diplomatique. C'est notamment ce qui a lieu depuis la fin du mois de mars 2024 entre le Royaume-Uni et la France. Le premier a décidé d'interdire certaines pratiques de pêche dans plusieurs de ses aires marines protégées (AMP). Ce que la seconde, soutenue par plusieurs autres États-membres de l'Union européenne, critique véhément, en appelant à la Commission européenne pour régler le différend.
D'autant que ce n'est pas la première fois que la France (en métropole ou en Outre-mer) prend le parti de la pêche, en particulier son versant industriel, aux dépens de celui de la biodiversité marine. Journalistes chargés du dossier pour Actu-Environnement, Félix Gouty et Laurent Radisson reviennent sur les rebondissements géopolitiques de cette affaire et tentent de répondre aux questions soulevées par cette situation complexe :
- Que signifie vraiment la « protection forte » ?
- Les AMP sont-elles réellement protégées ?
- Et sont-elles vraiment dommageables pour les pêcheurs ?
- Comment la France fait la balance entre son soutien continuel à la pêche industrielle et ses ambitieux engagements futurs en faveur de la biodiversité ?
Pour explorer le sujet en profondeur
Depuis le 22 mars, le Royaume-Uni interdit les engins de pêche de fond ou traînante à l'intérieur de treize aires marines protégées. Une décision décriée par les pêcheurs des Hauts-de-France jusqu'au gouvernement français, qui mène actuellement une coalition d'États-membres sollicitant un arbitrage de la Commission européenne.
De toute la surface des 6 700 aires marines protégées de l'Union européenne, plus de 60 % sont encore soumises à la pêche au chalut, pourtant appelée à en être exclue par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et même la Commission européenne.
En octobre 2023, un arrêté du gouvernement local de Nouvelle-Calédonie a créé de nouvelles réserves naturelles intégrales (en protection dite « forte ») au sein du Parc naturel de la mer de Corail, la plus grande AMP de France. En apparence louable, cette décision évite cependant soigneusement d'embêter les activités de pêche et de tourisme et, ce faisant, ne protège pas les zones les plus importantes pour la biodiversité.
Aux dernières nouvelles
Toujours en litige avec le Gouvernement sur le décret définissant la « protection forte », l'association Bloom a également adressé un recours au secrétaire d'État chargé de la Mer et de la Biodiversité, Hervé Berville, pour revoir les décrets autorisant l'usage du chalut, de la drague et de la senne dans les AMP françaises en mer Méditerranée.