Climat : l'ingénierie publique rassemblée pour répondre aux besoins d'adaptation des territoires
Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, déploie une offre commune en expertise et ingénierie des opérateurs de l'État pour accompagner les collectivités territoriales dans leur démarche d'adaptation au changement climatique.
Afin d'adapter leurs territoires aux risques climatiques, les collectivités réclament des financements, via notamment le Fonds vert de l'État, mais elles sont aussi souvent démunies en matière d'ingénierie. Pour les aider à y voir plus clair dans l'offre publique proposée par les opérateurs de l'État, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, a annoncé, jeudi 18 avril, la création de la Mission adaptation.
L'État mobilise ses services et ses opérateurs pour préparer le pays à une hausse moyenne des températures de 4 °C d'ici à la fin du siècle, comme le prévoit le troisième Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc) qui doit être adopté à l'été 2024. Cette nouvelle Mission facilitera ainsi le recours à l'expertise des organismes publics, tels que l'Agence de la transition écologique (ADEME), l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), ainsi que Météo-France, l'Office français de la biodiversité (OFB) et les agences de l'eau. Une convention a été signée, jeudi, à l'hôtel de Roquelaure, par ces parties prenantes, avec le ministre.
« Des représentants de collectivités nous ont dit que, finalement, c'est quand même assez compliqué de comprendre toute l'offre d'ingénierie qui existe à travers les différents opérateurs de l'État, ce n'est pas toujours très lisible », a reconnu Baptiste Perrissin-Fabert, directeur général délégué de l'ADEME. « Et puis, c'est aussi assez compliqué d'aller frapper à la porte de l'ADEME pour avoir sa stratégie globale, aller voir le CEREMA pour des diagnostics plus sectoriels, Météo-France pour des projections de son climat, ou les agences de l'eau et l'OFB si on veut renaturer nos centres-villes. C'est donc fort de ces retours que l'idée de cette mission est née », a-t-il expliqué.
La Mission adaptation est une « offre structurée » d'accompagnement des collectivités qui vient s'ajouter « à la palette de réponses déjà mises à la disposition des collectivités », a également indiqué Agnès Reiner, directrice générale déléguée de l'ANCT. Concrètement, les élus locaux bénéficieront donc d'« un guichet unique de l'ingénierie au niveau départemental » en passant par le préfet de département en sa qualité de délégué territorial de l'ANCT. La Mission adaptation aura aussi pour rôle de mobiliser les différents chefs de projets dont bénéficient les collectivités, dans le cadre des programmes Action cœur de ville, Petites villes de demain, Villages d'avenir, et de les former à l'enjeu de l'adaptation au changement climatique, a-t-elle ajouté.
La Mission adaptation apportera ainsi une formation à un chargé de mission au sein des collectivités, pour d'abord l'aider à identifier son besoin et ensuite l'inscrire dans une trajectoire d'adaptation au changement climatique, selon la méthodologie élaborée par l'ADEME dite TACCT(trajectoire d'adaptation au changement climatique des territoires). « C'est une méthodologie éprouvée que l'ADEME déploie depuis trois ans. On accompagne vingt collectivités par an (et) plus de 600 collectivités ont manifesté leur intérêt », a précisé Baptiste Perrissin-Fabert. La démarche globale Tacct se déroule en trois temps : d'abord, une phase de diagnostic et de compréhension des impacts, puis une phase d'élaboration de la stratégie et de mise en œuvre du plan d'action et, ensuite, une phase d'évaluation et de partage de bonnes pratiques avec les collectivités.
« À chaque moment de cette démarche », la Mission adaptation va pouvoir accompagner la collectivité vers les dispositifs qui existent au sein des différents opérateurs. « Typiquement, au moment du diagnostic, on pourra (recourir) à l'outil « Climadiag Commune » de diagnostic climatique proposé aux collectivités locales par Météo-France. Ensuite au moment des plans d'action, on pourra aller chercher les diagnostics (mis en œuvre) par le Cerema, ainsi que l'offre des agences de l'eau pour la remédiation et la renaturation des villes, ou encore les financements de la Banque des territoires pour accompagner les investissements », a expliqué le directeur général délégué de l'ADEME.
Le ministère de la Transition écologique et les opérateurs publics signataires de la convention prévoient de lancer une première phase d'expérimentation auprès de collectivités, afin de préciser l'offre de service et les modalités de fonctionnement entre les parties. Un bilan sera tiré à l'automne et pris en compte pour la phase de déploiement de ce dispositif. L'objectif de la Mission est que « chaque territoire accompagné construise une stratégie d'adaptation solide d'ici à 2030 », stipule leur convention [1].
Outre ce renforcement de l'offre d'ingénierie publique, 250 millions d'euros du Fonds vert [2] ont par ailleurs été alloués, en 2023, aux collectivités pour l'adaptation de leurs territoires. Ainsi, 2 403 projets ont pu être soutenus sur ce thème l'an dernier, sur les 10 689 financés grâce à ce dispositif, précise le ministère. La totalité de l'enveloppe, soit 2 milliards d'euros, a été utilisée pour financer notamment des projets pour accompagner la stratégie nationale biodiversité 2030 (10 %), la renaturation (8 %), l'appui à l'ingénierie de la transition écologique (5 %), ainsi que le recyclage des friches (6,5 %) ou encore la prévention des inondations (3,5 %) et la prévention des risques d'incendie de forêts (4,5 %). Un tiers (32 %) des projets ont en outre bénéficié de la majorité de l'enveloppe pour la rénovation énergétique de bâtiments, dont les écoles.
Pour faciliter la transition écologique des territoires, « non seulement le Fonds vert continue d'exister, mais il est sanctuarisé à son niveau de l'année dernière à 2 milliards d'euros », a assuré Christophe Béchu, devant les élus locaux réunis, jeudi, au ministère, en réaffirmant « l'utilité » de ce dispositif. En février dernier, la diminution des crédits du Fonds vert pour 2024, sur les 2,5 milliards initialement prévus, avait été perçue comme « un très mauvais signal » par plusieurs associations d'élus locaux.
« En 2023, 10 000 projets variés ont été soutenus sur le territoire national, avec 17 000 demandes émanant des collectivités, avec parfois des disparités régionales extrêmement fortes. Avec au nord du pays, énormément de projets de dépollution ou de renaturation de friches, mais aussi des mesures très au-dessus de la moyenne en faveur de la biodiversité, en Corse ou sur une partie du pourtour méditerranéen, avec des impacts sur les espèces ou sur les herbiers de posidonies qui ont conduit à des niveaux de prise en charge importants », a ainsi salué le ministre.
[1] Télécharger la convention signée dans le cadre de la Mission adaptation
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43924-convention-mission-adaptation.pdf2.
[2] Télécharger le bilan du Fonds vert pour 2023
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43924-bilan-fonds-vert-2023.pdf