Pas à pas, les transports se convertissent aux renouvelables
Particulièrement carboné, le secteur des transports doit encore largement développer la part du renouvelable dans ses approvisionnements en énergie. Un rapport d'EurObserv'ER fait le point sur les progrès accomplis en 2022.
Lentement mais sûrement, la part des énergies renouvelables progresse en Europe dans le secteur des transports. Selon le baromètre publié au mois de décembre par le consortium EurObserv'ER, cette proportion se rapprocherait désormais de 10 %, pour l'ensemble des branches – route, ferroviaire, maritime et aérien –, après avoir augmenté de 2 % entre 2021 et 2022, dans un contexte de reprise générale du trafic post pandémie de Covid-19. Le total atteindrait aujourd'hui près de 19,4 mégatonnes équivalent pétrole (Mtep) : 17,2 Mtep pour les biocarburants et 2,2 Mtep d'électricité d'origine renouvelable, soit l'équivalent de 25,9 térawattheure (TWh).
Entre 2020 et 2021, cette croissance avait été plus importante (4,3 %), boostée notamment par l'essor du bioéthanol (+ 11 %). Entre 2021 et 2022, la hausse serait plutôt imputable à l'électrification de la mobilité et à la montée en puissance de la consommation de biocarburants « avancés », non issus de cultures alimentaires.
Cette expansion rapide de l'utilisation de biocarburants avancés s'explique par les investissements importants réalisés dans ce domaine par certains grands groupes, souvent des pétroliers, comme Neste, Eni ou Shell. Les producteurs bénéficient d'une diversification des sources d'approvisionnement – huile de friture, cellulose, paille… – mais ils doivent aussi sécuriser ces flux très recherchés sur le marché mondial.
Avec environ 3,1 mégatonnes équivalent pétrole consommées, la France se classe première des pays de l'UE utilisateurs de biocarburants. Mais avec 1,47 Mt vendues, l'Italie se place en tête pour les biocarburants « avancés » ou issus d'huile de cuisson usagée et de graisses animales. La France n'est que sixième avec 0,3 Mt achetées.
Si la part de la consommation d'électricité renouvelable dans les transports reste encore proportionnellement mineure, elle évolue en revanche à grande vitesse. En 2022, elle a ainsi augmenté de quelque 18 % (+71 % pour la route, + 11,2 % pour le ferroviaire), en raison de la relance du transport ferroviaire, de la montée en puissance des ventes de véhicules électriques, surtout en Allemagne et en France, et de la croissance de la part renouvelable dans la production d'électricité.
Cette année 2022, le nombre des nouvelles immatriculations de voitures électriques et hybrides rechargeables, s'est établi à près de 2 millions sur une flotte totale de 6 millions, contre un peu plus de 1,7 million en 2021. Sous l'impulsion des pouvoirs publics, le maillage des bornes de recharge continue par ailleurs de se densifier, quoique inégalement selon les territoires, augmentant de plus de 49 % entre 2021 et 2022.
Les différents soutiens européens et nationaux, en faveur de l'électrification des réseaux routiers, de la production de biocarburants et biogaz « avancés », d'hydrogène ou de carburants de synthèse devraient permettre de conforter cette tendance. Vendredi 29 décembre, la France a par exemple publié un décret instaurant une taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports. Le texte fixe notamment les conditions permettant de garantir la traçabilité de la production d'hydrogène renouvelable. Il simplifie les déclarations relatives aux quantités d'électricité renouvelable consommées par les infrastructures de recharge pour véhicules électriques et il institue un certificat d'énergie renouvelable additionnelle permettant aux redevables ayant dépassé leur objectif de céder des droits à minoration à d'autres redevables.
Mais ces efforts seront-ils suffisants ? Les enjeux sont d‘autant plus importants que, dans les prochaines années, le secteur de la mobilité devra se conformer à de nouveaux règlements européens : ReFuelEU Aviation, FuelEU Maritime, norme Euro 7 pour la route… La nouvelle directive relative aux énergies renouvelables (RED III) publiée en octobre 2023 fixe d'ailleurs aux Etats une cible de consommation de biocarburants « avancés » de 5,5 % en 2030, incluant le biogaz et les carburants de synthèse. Plus globalement, à cette même échéance, l'Union leur impose de choisir entre deux contraintes : soit réduire de 14,5 % leurs émission de gaz à effet de serre dans les transports grâce à l'utilisation d'énergies renouvelables, soit atteindre une part d'au moins 29 % d'énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie du secteur des transports.
Les pays de l'UE devront cependant veiller à affiner leurs stratégies en la matière. Dans un rapport publié en décembre dernier, la Cour des comptes de l'Union Européenne alertait par exemple les gouvernements contre le manque d'efficacité des subventions actuellement allouées au développement des biocarburants de deuxième génération. Dans son ensemble, le secteur des transports représente encore un quart environ des émissions de gaz à effet de serre de l'UE en équivalent CO2 (CO2, CH4, N2O et HFC compris).