La Terre est sur le point de franchir cinq points de bascule : une menace "sans précédent"
La Terre toujours plus dans le rouge. Sur 26 points de bascule – ou "tipping points" - identifiés, cinq sont à la limite d’être franchis, et trois autres pourraient l’être très prochainement si les températures continuent d’augmenter, avertit une nouvelle étude publiée ce mercredi 5 décembre. Une alerte supplémentaire alors que les pays présents à la COP28 de Dubaï doivent statuer sur la sortie, ou non, des énergies fossiles, responsables du changement climatique.
Cinq points de bascule climatiques, sur les 26 recensés, sont sur le point d'être franchis, selon une nouvelle étude publiée ce mercredi 5 décembre.
Au rythme actuel, il nous reste moins de sept ans pour agir et rester sous la barre des 1,5°C de réchauffement, selon les estimations du Global Carbon Project. Mais la Terre, elle, n’attendra pas. Cinq points de bascule climatiques – ou "tipping points" en anglais - sont à la limite du point de non-retour en raison du réchauffement déjà observé, avertit une nouvelle étude menée par près de 200 scientifiques internationaux et coordonnée par l’université d’Exeter, au Royaume-Uni, publiée ce mercredi 5 décembre.
Pour Tim Lenton, spécialiste du système terrestre à l’université d’Exeter et auteur principal du rapport, ces points de bascule sont une "menace d’une ampleur sans précédent pour l’humanité". "Il s'agit de ces seuils critiques du réchauffement au-delà desquels les systèmes impliqués dans la régulation du climat de la Terre ne pourraient plus jouer leur rôle, avec des conséquences irréversibles pour les écosystèmes, et donc les sociétés humaines", explique le chercheur.
Le temps est donc compté pour les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique, mais aussi pour les récifs coralliens tropicaux, pour le pergélisol, qui contient notamment du méthane, un gaz à effet de serre bien plus réchauffant que le CO2, ou encore pour le gyre subpolaire de l’Atlantique Nord, ce courant océanique qui fait partie de la circulation méridienne de retournement atlantique (AMOC). Et chacun de ces changements aurait un impact considérable sur l’homme et l’ensemble des écosystèmes.
"[Le ralentissement du gyre subpolaire] pourrait se produire d'ici dix ans environ", explique David Armstrong McKay, également de l'Université d'Exeter. "Cela aurait des impacts assez importants des deux côtés de l’Atlantique. Cela provoquerait un refroidissement régional et affecterait l’agriculture en Europe et en Amérique du Nord, et modifierait les schémas d’événements météorologiques extrêmes" explique-t-il.
Pour le Groenland, il est même peut-être déjà trop tard. "Le point de bascule est-il dépassé ou bien est-il encore possible d’inverser la tendance ? Personne n’en est tout à fait sûr", confie Tim Lenton. La fonte des calottes glaciaires de l’Antarctique occidental et du Groenland pourrait augmenter le niveau de la mer de deux mètres d’ici à 2100, exposant ainsi près d’un demi-milliard de personnes à de fréquentes inondations côtières, précise le rapport.
Les scientifiques préviennent qu'il existe de grandes incertitudes quant au moment où ces systèmes changeront, mais le rapport révèle que trois autres points de bascule pourraient bientôt rejoindre la liste. Il s’agit notamment des mangroves et des herbiers marins, qui devraient disparaître dans certaines régions si les températures augmentent entre 1,5°C et 2°C, et des forêts boréales, qui peuvent être impactées dès 1,4°C de réchauffement ou aussi tard que 5°C.
Mais, il n’y a pas que des mauvaises nouvelles. Le rapport met aussi en évidence une série de points de bascule positifs, tels que la hausse des ventes de véhicules électriques, l'essor des énergies renouvelables ou encore l’adoption d’un régime alimentaire à base de plantes. Ces derniers pourraient rapidement prendre de l'ampleur et faire basculer les choses dans l’autre sens. Néanmoins, ces changements ne se produisent pas d’eux-mêmes, ils doivent être rendus possibles par la mise en place de nouvelles politiques publiques.
C’est pour cette raison que les auteurs du rapport appellent à ce que ces points de bascule soient inclus dans le bilan mondial, actuellement débattu à la COP28 de Dubaï, et dans les objectifs nationaux de lutte contre le changement climatique.