Un million de pompes à chaleur en 2027 : un objectif inutile sans un plan massif de rénovation des bâtiments

Publié le par Novethic via M.E.

Les pompes à chaleur, solution miracle pour verdir nos bâtiments ? Ce mode de chauffage bas-carbone vanté par Emmanuel Macron fait en effet partie de la palette d'outils à développer pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, mais il présente aussi toute une série de limites à commencer par sa pertinence s'il est installé dans un logement mal isolé.

Le gouvernement vise un million de pompes à chaleur made in France d'ici 2027. iStock

"Nous avons décidé de tripler la production de pompes à chaleur d'ici à 2027 et d'arriver à en produire un million sur notre territoire et former en parallèle 30 000 installateurs." Voici l’une des principales annonces d’Emmanuel Macron lors du Conseil de planification écologique qui s’est tenu le 25 septembre après de nombreux reports. Une annonce bienvenue car les pompes à chaleur sont en effet un mode de chauffage bas-carbone, intéressant pour remplacer les chaudières à gaz ou au fioul, très polluantes. Mais qui est loin d’être suffisante.

"Il ne suffit pas de remplacer les chaudières fonctionnant aux énergies fossiles, il faut isoler les logements", réagit Delphine Mugnier, co-présidente du Cler-Réseau pour la transition énergétique. "Une pompe à chaleur installée dans un logement mal isolé va nécessiter beaucoup plus d'électricité pour fonctionner, ce n'est donc pas la première mesure à mettre en avant. Mais il est plus simple de s’attaquer au mode de chauffage qu’au sujet plus complexe de la rénovation", souligne également auprès de Novethic Alexandre Joly, responsable du pôle Energie de Carbone 4. 

"Dix réacteurs nucléaires supplémentaires"

Le rapport d’information sur la rénovation énergétique des bâtiments publié mercredi 4 octobre, appelle lui aussi à "changer de paradigme" et à donner la priorité à la baisse des consommations, et donc à l’isolation des bâtiments, et non seulement au système de chauffage. Or de rénovation, il n’en a été que très peu question dans le discours du chef de l’État qui n’a fait aucune nouvelle annonce. Pire encore, quelques jours plus tard, Bruno Le Maire semait la confusion autour de l’interdiction de louer des passoires thermiques, seule mesure aujourd’hui contraignante sur le dossier de la rénovation des bâtiments, avant de rétropédaler.

L’avènement de la pompe à chaleur, agitée comme une solution magique, fait en outre face à de nombreux obstacles. Pour arriver à des pompes à chaleur 100% made in France, il va falloir relocaliser la production d’un certain nombre de composants, et notamment les compresseurs, fabriqués en Asie. Aujourd’hui, environ 50% de la chaîne de valeur seulement est française. La filière souffre aussi d’une pénurie de compétences. Face à la demande croissante des professionnels, La Solive, qui forme aux métiers de la rénovation énergétique depuis 2021 vient d'ouvrir une nouvelle formation d’installateur de pompes à chaleur. Mais il va falloir accélérer pour tenir les objectifs.

Un panache de solutions

Enfin, si les pompes à chaleur diminuent effectivement la consommation énergétique chez les ménages, pour fonctionner elles requièrent une plus grande consommation électrique. "Si on remplaçait tout le système énergétique pour passer des fossiles aux pompes à chaleur, ça ne tiendrait pas, alerte Alexandre Joly. Dans le bâtiment, remplacer le gaz par les pompes à chaleur nécessiterait l’équivalent de dix réacteurs nucléaires supplémentaires". Une solution intenable, car à l’heure de l’électrification massive de tous nos usages (mobilité, industrie…), il va falloir prioriser.

L’expert regrette ainsi que le président n’ait pas mentionné les autres technologies disponibles et tout aussi efficaces. "Le solaire thermique, deux fois plus efficace en termes d’énergie que le solaire photovoltaïque, la géothermie profonde et plus globalement les réseaux de chaleur sont autant de solutions qui doivent être défendues mais qui sont aujourd’hui sous-valorisées. Elles contribuent pourtant aussi à notre souveraineté", note Alexandre Joly.

Si on regarde les objectifs à 2030, sans surprise seules les pompes à chaleur et dans une moindre mesure la biomasse suivent le bon rythme. Très loin derrière, le solaire thermique, le biogaz et la géothermie profonde accusent un important retard, selon les estimations du cabinet Carbone 4, qui a comparé le rythme de croissance de ces dernières années à celui qui nous permettrait d'atteindre les objectifs.

Source : https://www.novethic.fr/actualite/energie/transition-energetique/isr-rse/un-million-de-pompes-a-chaleur-en-2027-un-objectif-inutile-s-il-n-est-pas-accompagne-d-un-plan-massif-de-renovation-des-batiments-151803.html

Publié dans Climat, Energie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :