Sécheresse : le retrait-gonflement des argiles qui fissure les maisons va faire exploser le coût des aléas climatiques
Une maison sur deux en France est exposée au risque de retrait-gonflement des argiles, qui provoque des fissures lors d'un épisode de sécheresse. Dès lors, selon de nouvelles données publiées par la Caisse centrale de réassurance (CCR), c'est ce risque de sécheresse géotechnique qui apparaît comme le plus coûteux dans une France qui se réchauffe de plus en plus vite, avec une hausse annuelle moyenne de 750 millions d'euros d'ici 2050.
Une maison sur deux en France est exposée au risque de retrait-gonflement des argiles (RGA) qui cause des fissures lors des épisodes de sécheresse.
Les impacts du changement climatique coûtent déjà cher à la France mais ils vont exploser à l’avenir. C’est l’alerte que lance la Caisse centrale de réassurance (CCR), le réassureur public français pour les catastrophes naturelles, dans une nouvelle étude portant sur l’impact du changement climatique sur le coût des catastrophes naturelles à horizon 2050. Les auteurs tablent ainsi sur une "augmentation significative" des coûts liés au réchauffement climatique d’ici 2050, et ce quel que soit le scénario du GIEC dans lequel on se place, en raison d’une hausse de l’intensité des événements climatiques.
Selon ces nouvelles données, la sinistralité au titre des périls couverts par le régime des catastrophes naturelles dit Cat Nat (inondation, sécheresse, submersion marine, vents cycloniques, tremblement de terre) devrait augmenter d’environ 40 % à horizon 2050 sous l’effet du changement climatique et 60 % si on intègre l’évolution des enjeux assurés, c’est-à-dire l’évolution de la population et la densité urbaine qui accroît logiquement le montant des sinistres. Cela devrait se traduire par une hausse des primes d’assurance de "sept points à court terme" suivie "d’une hausse supplémentaire de trois points", prévient la CCR.
Pour le péril "inondation", le coût moyen annuel devrait augmenter de 15% d’ici à 2050 (soit +148 millions d’euros par an) et de 38 % (soit +370 millions d’euros par an) si on suit l’évolution des enjeux assurés. Pour le péril "submersion marine", le coût moyen annuel devrait augmenter de 85% d’ici à 2050 (soit +58 millions d’euros par an) et de 112 % (soit +76 millions d’euros par an) si on suit l’évolution des enjeux assurés. Mais c’est la sécheresse géotechnique, et ses conséquences sur le retrait-gonflement des argiles (RGA), qui apparaît comme le péril le plus préoccupant compte tenu du montant des dommages qu’elle engendre et de leur forte évolution future.
Le coût moyen annuel lié aux sécheresses devrait augmenter de 83 % d’ici à 2050 (soit + 606 millions d’euros par an) et de 103 % (soit + 747 millions d’euros par an) si on suit l’évolution des enjeux assurés. Mais ça c’est une moyenne. Si l’on prend le scénario RCP 8,5 du Giec, qui suppose une poursuite des émissions de gaz à effet de serre au rythme actuel, alors le coût lié aux sécheresses augmenterait de 162 à 190 % d’ici 2050.
"Comme les six dernières années nous l’ont montré, la sécheresse géotechnique sera dans les prochaines années le principal aléa que nous devrons prendre en compte. Dans ce contexte, la question que nous devons nous poser collectivement, c’est la façon dont nous adaptons notre bâti existant et futur à la problématique du Retrait-gonflement des argiles", explique Édouard Vieillefond, directeur général de CCR.
En 2022, les fissures des maisons causées par la sécheresse sont devenues le sinistre lié aux aléas climatiques le plus coûteux pour les assurances avec un coût réévalué par la CCR à 3,5 milliards d’euros. Il est estimé à 900 millions d’euros pour l’année 2023 selon une première évaluation. À ce jour, plus de 6 000 communes ont été reconnues en état de sécheresse pour 2022, ce qui leur permet d'avoir accès au régime Cat Nat. C’est bien plus qu'après la canicule de 2003 avec quelque 4 000 communes reconnues en état de catastrophe naturelle.
Selon un rapport parlementaire consacré au sujet et remis au gouvernement la semaine dernière, 10,5 millions de maisons sont exposées à ce risque, soit une maison sur deux. Le député Renaissance Vincent Ledoux y plaide pour "une action publique de grande ampleur". Le rapport propose par exemple de suspendre les remboursements de crédit bancaire et de la taxe foncière pour les foyers touchés ou encore de mettre en place un mécanisme de rattrapage pour les communes qui n'ont pas obtenu la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle après un épisode de sécheresse.
Tout autant de propositions qui pourraient être reprises dans la mission sur l'assurabilité des risques climatiques lancées par le gouvernement en mai dernier et qui doit rendre ses conclusions, très attendues, d’ici la fin de l’année.