Pourquoi la présence du moustique-tigre pourrait encore augmenter cette année
La saison du moustique-tigre va s'ouvrir le 1er mai dans l'Hexagone. Les autorités sanitaires appellent à une vigilance renforcée face à cet insecte vecteur de maladies tropicales telles que la dengue et le chikungunya.
C'est entre le 1er mai et le 30 novembre que le moustique-tigre est le plus actif. Arrivé en métropole en 2004, l'aedes albopictus est dorénavant sous haute surveillance car sa présence s'est progressivement étendue à une large majorité du territoire. Si seuls «dix départements étaient touchés en 2010», ils étaient 71 au 1er janvier 2023, souligne l'infectiologue et professeur Gilles Pialoux. «Aujourd'hui, on trouve ce moustique jusqu'au Bois de Vincennes».
Reconnaissable grâce à ses rayures noires et blanches, l'aedes albopictus inquiète surtout les autorités en raison des maladies qu'il transmet aux hommes : peuvent être transmis par sa piqûre la dengue, le chikungunya mais aussi le virus Zika dans une moindre mesure. Le Comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires (Covars) a d'ailleurs émis le 3 avril dernier un communiqué pour alerter sur le risque de flambée de ces maladies «au cours des prochains étés». Ces dernières «pourraient devenir des problèmes de santé publique». Car, «si on s'en tient à l'évolution normale, on a la certitude que tous les départements seront touchés par le moustique tigre dans les années à venir», alerte l'infectiologue.
L'été dernier, 65 cas autochtones de dengue - des patients qui n'ont pas voyagé dans des zones où le virus circule mais qui ont été piqués par un moustique s'étant lui-même infecté au contact d'un voyageur contaminé - ont été détectés dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, en Occitanie mais aussi en Corse. On comptait également 272 cas de dengue importés.
Et pour les spécialistes, ce n'est qu'un début qui requiert toute l'attention des autorités. «Plusieurs facteurs sont à prendre en compte», souligne d'emblée le professeur Gilles Pialoux. Et en premier lieu, le réchauffement climatique : «Ce dernier facilite l'existence du vecteur sur le territoire (du moustique, NDLR), sa reproduction et lui permet même de transmettre les maladies plus facilement». La chaleur accélère en effet le cycle de développement du moustique tigre et augmente la vitesse de multiplication du virus en son sein. Mais pour l'expert, la propagation ne peut pas se limiter à la question climatique. C'est aussi celle de «l'arborisation des villes» qui doit intéresser les autorités. Les forêts urbaines et autres petits foyers végétaux permettent effectivement aux moustiques de s'installer durablement dans les milieux urbains et de se reproduire in fine.
Les autorités redoutent enfin les importants déplacements de populations provoqués par les Jeux olympiques 2024, qui auront lieu en France. «Il y aura de plus en plus de cas importés d'une part et de plus en plus de cas autochtones de l'autre donc il faut prendre ce risque au sérieux», tranche ainsi l'infectiologue.
Pour faire face à ces risques, le gouvernement insiste sur l'importance d'une réponse rapide et efficace dès cet été. Il invite par exemple les Français, même dans les milieux urbains, à supprimer les «eaux stagnantes à l'intérieur et autour des habitats».
«La surveillance de la présence du moustique tigre repose aussi sur le signalement citoyen», a ainsi affirmé le ministère de la Santé et de la prévention dans un communiqué le 27 avril. Ce dernier a d'ailleurs mis en place une carte en ligne qui permettra de suivre en temps réel la diffusion du moustique tigre en France métropolitaine. Les départements fortement colonisés par ce moustique sont concentrés dans le Sud-Est. «Il y a un fort gradient Nord-Sud», souligne le professeur Gilles Pialoux.
Pour l'infectiologue, c'est surtout la rapidité de la réaction sanitaire qui sera déterminante : «On sait ce qu'il faut faire en cas d'expansion rapide des maladies, notamment en Martinique ou à la Réunion où il y a eu des politiques exemplaires», souligne-t-il avant d'ajouter «et il ne faut pas penser que ce n'est valable que pour l'extra-Hexagone».