Climat : cinq questions pour tout comprendre au nouveau rapport du GIEC
Du 13 au 17 mars 2023, les scientifiques du GIEC, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l'évolution du climat (IPCC en anglais), se sont réunis en Suisse afin d’adopter la synthèse de leur 6ème rapport d’évaluation, et ainsi clore ce cycle débuté en 2015. Cette synthèse sera ensuite publiée le 20 mars et constituera le dernier consensus scientifique sur le climat à date.
La synthèse du 6ème rapport d’évaluation sera publiée le 20 mars et constituera le dernier consensus scientifique sur le climat à date.
Le GIEC, Groupe Intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, est un organe scientifique. Il a été créé en 1988, par l’Organisation météorologique mondiale et le Programme pour l’environnement des Nations-Unies. Ses membres sont des pays et non pas des personnes physiques. À l’heure actuelle, 195 pays en sont membres, soit quasiment tous les pays du monde.
La mission du GIEC est "de fournir des évaluations détaillées de l’état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques sur les changements climatiques, leurs causes, leurs répercussions potentielles et les stratégies de parade". Les milliers de scientifiques du GIEC, qui travaillent bénévolement, produisent donc une synthèse de la littérature scientifique existante et en aucun cas ne formulent de recommandations, ne conduisent des travaux de recherche ou ne suivent l’évolution des données ou paramètres climatologiques.
Le GIEC se compose actuellement de trois groupes de travail, à quoi s’ajoute l’Équipe spéciale chargée des inventaires nationaux de gaz à effet de serre. Ceux-ci sont appuyés par des unités d’appui technique. Le Groupe de travail I se charge des éléments scientifiques de l’évolution du climat, le Groupe de travail II des conséquences, de l’adaptation et de la vulnérabilité, et le Groupe de travail III de l’atténuation du changement climatique.
Les groupes de travail se réunissent en assemblées plénières auxquelles participent des représentants gouvernementaux. Le GIEC fonctionne par cycles de cinq à sept ans. Depuis sa création, il a établi cinq rapports d’évaluation – en 1990, 1995, 2001, 2007 et 2014 – qui ont permis d’affirmer de manière de plus en plus solide que les activités humaines sont responsables du réchauffement planétaire.
Le GIEC a entamé son sixième cycle d’évaluation en 2015. Celui-ci va s’achever avec la publication de la synthèse du 6e rapport d'évaluation le 20 mars prochain.
La synthèse finale de ce 6ème rapport sera composée de deux textes :
Le premier sera un condensé, en une cinquantaine de pages, des trois rapports principaux publiés en 2021 et 2022 - sur les preuves physiques du réchauffement, sur ses impacts et enfin sur les mesures d'atténuation - et des trois rapports spéciaux - sur les conséquences d'un réchauffement de +1,5°C, sur les océans et la cryosphère, et sur les terres émergées.
Le second texte, d'une dizaine de pages, sera le "résumé pour les décideurs", un texte hautement politique qui doit être approuvé ligne par ligne par les délégués des 195 pays membres. Il constituera le dernier consensus scientifique sur le changement climatique et sera particulièrement utile lors de la COP28 sur le climat, organisée en fin d’année aux Emirats arabes unis, où doit se tenir le premier bilan des engagements pris par les États depuis l'adoption de l’Accord de Paris.
"Une fois approuvé, le rapport de synthèse deviendra un document politique fondamental pour façonner l'action climatique au cours de cette décennie charnière", a déclaré le président du GIEC, Hoesung Lee, en ouvrant la conférence.
En octobre 2018, le GIEC publie un rapport spécial sur un réchauffement à 1,5°C, commandé par les gouvernements en décembre 2015, lors de la COP 21 de Paris. Il montre qu’au-delà de cette température, nous augmentons le risque de changements pérennes ou irréversibles, tels que la disparition de certains écosystèmes.
En août 2019, le GIEC alerte sur le rôle de l’agriculture dans la dégradation des terres mais aussi sur le potentiel du secteur pour séquestrer le carbone dans les sols dans son rapport consacré aux terres émergées.
Puis le mois suivant, en septembre 2019, les scientifiques démontrent le cercle vicieux dans lequel l'humanité est entrée, dans son rapport consacré aux océans. La fonte des glaciers les préoccupe tout particulièrement.
En août 2021, le rapport du groupe de travail I confirme que certains effets du changement climatique sont déjà irréversibles, notamment sur les glaciers.
Le rapport du groupe de travail II en février 2022 révèle que s’adapter au changement climatique pourrait être impossible au-delà de 2°C.
Enfin, le dernier opus, publié en avril 2022 met l’accent sur les solutions et notamment l’importance de changer nos modes de vie et de production à travers la sobriété.
En toute logique, le GIEC devrait lancer un 7ème cycle d’évaluation qui devrait aboutir aux alentours de 2030, une date clé dans la lutte contre le changement climatique.
Des rapports spéciaux pourraient également être publiés sur des sujets précis comme le rôle des villes dans la transition climatique.
"La Suisse propose que les points de basculement fassent l'objet d'un rapport dans le prochain cycle", précise Valérie Masson-Delmotte, l'une des autrices du groupe de travail I du GIEC.
Mais certains scientifiques se demandent s’il est vraiment pertinent de repartir sur un tel cycle.
"Ça n’aurait pas de sens de mobiliser toute la communauté scientifique pour un nouveau cycle d’évaluation. La fabrique des rapports est chronophage pour les scientifiques", explique la chercheuse Kari De Pryck, interrogée par Reporterre. "La vérité, c’est que nous avons les informations essentielles depuis longtemps. Les conclusions principales du cycle AR6, incontestables, sont quand même très proches d’AR5, publié en 2014. Le GIEC a fait sa part du boulot."