Un graphique pour comprendre la triple crise des inégalités climatiques en un clin d’œil
Le nouveau rapport du Laboratoire des inégalités mondiales, publié le 31 janvier, met en lumière la triple crise des inégalités climatiques : inégalités dans les émissions de CO2, inégalités des pertes liées aux impacts du réchauffement et inégalités dans les capacités financières à y faire face. Sans surprise, les populations les plus pauvres sont les plus affectées, que ce soit au sein des pays en développement ou développés. Les auteurs appellent à cibler en priorité les ultra-riches, afin de lutter contre le changement climatique mais aussi d'éradiquer la pauvreté.
Les populations les plus pauvres sont celles qui subissent le plus durement les impacts du changement climatique alors qu’elles en sont le moins responsables et qu’elles ont le moins de capacités à y faire face.
C’est un graphique qui permet de résumer à lui seul les inégalités climatiques entre les plus pauvres et les plus riches. Deux chiffres en particulier attirent l’attention, située aux deux extrémités. Ils sont quasiment identiques mais traduisent le fossé actuel.
Le premier indique le pourcentage de pertes de revenus liées au changement climatique subies par la moitié des plus pauvres. Il atteint 75%.
Le second se réfère aux capacités de financement à faire face au changement climatique pour les 10 % les plus riches. Il atteint 76%.
En somme, les populations les plus pauvres sont celles qui subissent le plus durement les impacts du changement climatique alors qu’elles en sont le moins responsables et qu’elles ont le moins de capacités à y faire face, tandis que les plus riches, qui sont les principaux responsables du changement climatique, sont ceux qui ont le plus de moyens d’y faire face mais qui en subissent le moins les conséquences.
C’est un constat qui n’est pas nouveau, et qui est répété depuis des années dans les négociations climatiques internationales. Mais sa traduction en données, issues du dernier rapport "Inégalités climatiques 2023", du Laboratoire sur les inégalités mondiales (World Inequality Lab), publié le 31 janvier, permet d’enfoncer le clou.
Surtout le rapport apporte un éclairage complètement nouveau sur le fait que les inégalités climatiques sont désormais bien plus importantes au sein des pays qu'entre les pays. Une tendance qui s'est inversée sur les trente dernières années. Pourtant, dans les COP par exemple, on continue de parler de blocs de pays (riches contre pauvres). Or, dans les pays développés, les personnes à faible revenu contribuent moins à la crise climatique que les plus riches dans les pays en développement. Ainsi, les 10 % les plus riches en Inde émettent autant que les 50 % les plus pauvres aux Etats-Unis. Ou encore les 10 % les plus riches émettent 3,6 fois plus que les 50 % plus pauvres aux Etats-Unis.
Dès lors, le rapport montre que la lutte contre le changement climatique et l’éradication de la pauvreté sont en réalité les "deux faces d’une même médaille". Sortir de la pauvreté en fixant le seuil à 5,5 dollars minimum par jour entraînerait des "améliorations significatives du niveau de vie pour près de la moitié de la population", précisent les auteurs. Cela aurait aussi pour effet une hausse des émissions de 18% au niveau mondial. Un chiffre qui peut paraître élevé mais qui est à relativiser puisqu’il correspond à peu près aux émissions des 1% les plus riches de la planète. "Réduire la consommation de carbone au sommet peut ainsi libérer les budgets nécessaires pour sortir les gens de la pauvreté", note le rapport.
Les auteurs proposent enfin de mettre en place une taxe baptisée "1,5% pour 1,5°C" qui taxerait les actifs à hauteur de 1,5% entre 100 millions et un milliard de dollars, puis 2% entre 1 et 10 milliards de dollars, 2,5% entre 10 et 100 milliards de dollars, et 3% pour les actifs supérieurs à 100 milliards de dollars. Cela permettrait de générer 295 milliards de dollars par an, de quoi couvrir les besoins d’adaptation au changement climatique.
Parmi les autres pistes avancées, il y a aussi la mise en place d’impôts progressifs sur les revenus notamment dans les pays en développement, qui sous-imposent souvent les citoyens et les entreprises riches. L’idée d’une taxe sur les superprofits ou sur le secteur aérien, le maritime et les énergies fossiles est également défendue.