Dans un contexte de risque de coupures électriques, les députés doivent se prononcer sur l’accélération des énergies renouvelables
Alors que le gouvernement se prépare à des coupures de courant cet hiver, les députés vont-ils trouver un accord pour adopter le projet de loi d'accélération des énergies renouvelables et ainsi augmenter les capacités de production électriques de la France ? Le texte arrive à l'Assemblée nationale aujourd'hui et a déjà été détricoté en commission. Les craintes portent sur la protection de la biodiversité qui ne serait pas toujours garantie.
D’éventuelles coupures programmées pourraient concerner 60 % de la population en janvier prochain.
Changement de ton au sein du gouvernement. D’abord rassurant quant à un éventuel risque de coupures cet hiver, il semble désormais plus inquiet. La semaine dernière, une circulaire a ainsi été envoyée aux préfets pour leur demander d’anticiper d’éventuelles coupures programmées en janvier. Celles-ci pourraient concerner 60% de la population qui ne se trouve pas en zone "prioritaire" (environ 14 000 sites prioritaires, hôpitaux, sites sensibles pour la défense nationale, etc.). Les coupures auraient lieu aux moments des pics de consommation, entre 8h et 13h le matin, et entre 18h et 20h le soir, et dureraient deux heures maximum. Elles seraient aussi réparties sur tout le territoire et ne concerneraient jamais un département entier.
En conséquence, la téléphonie mobile et l'internet ne fonctionneraient pas dans les zones délestées, tout comme le téléphone fixe, avec un risque de ne pas pouvoir joindre le numéro d’urgence 112.
Les écoles ne seraient pas non plus épargnées et seraient fermées le matin pour ne pas accueillir les enfants sans chauffage, ni lumière, ni alarme. Des trains, métros ou tramways pourront être annulés ou interrompus pour éviter d'avoir des passagers bloqués en pleine voie.
L'éclairage public pouvant s'éteindre, il sera également demandé aux Français de limiter au maximum leurs déplacements en voiture en cas de coupure le soir. De quoi provoquer de nombres réactions indignées sur les réseaux sociaux.
"Des écoles vont fermer pour coupure d'électricité mais ces écrans publicitaires qui consomment autant qu'un ménage sont toujours allumés. Tout ça pour continuer à engraisser les multinationales et leurs oligarques."
Attention @EmmanuelMacron, qui sème le vent récolte la tempête. pic.twitter.com/HAQfbrrTYE
— Khaled GAIJI | @kgaiji@framapiaf.org (@KhaledGaiji) December 1, 2022
Dans ce contexte pour le moins tendu, les députés débutent ce lundi 5 décembre l’examen du projet de loi sur l’accélération des énergies renouvelables, un texte clé pour augmenter nos capacités de production électrique et rattraper notre retard en la matière. Mais le gouvernement a déjà essuyé un premier revers en commission, avec le rejet d'un article clé visant à limiter les recours contre les projets éoliens et solaires. Des députés écologistes, LR et RN ont critiqué une menace pour la préservation de la biodiversité. Cet article est une "sérieuse régression environnementale", a accusé Nicolas Thierry (EELV).
Cet article 4 sert à réduire les délais en limitant certains recours. Il concerne la "reconnaissance de la raison impérative d'intérêt public majeur (RIIPM) pour certains projets d'installation d'énergies renouvelables" et prévoit que "la déclaration d'utilité publique (DUP) puisse valoir reconnaissance du caractère d'opérations répondant à des RIIPM". Le gouvernement prévoit de le remettre dans le projet de loi. "Cet article est essentiel pour l'accélération des projets d'énergies renouvelables, sans revenir en rien sur l'enjeu prioritaire de protection de la biodiversité", a assuré Agnès Pannier-Runacher.
L’adoption du projet de loi apparaît néanmoins crucial pour faire face aux tensions actuelles sur le réseau électrique. Ce qui est en cause, c'est la baisse de la production d’électricité nucléaire, elle-même liée à des retards de maintenance et des problèmes de corrosion, mais aussi le retard pris par la France sur le développement des énergies renouvelables. Le pays est le seul à ne pas avoir atteint ses objectifs européens en 2020. Et n’est toujours pas sur la bonne trajectoire.
Selon de nouvelles données publiées vendredi 25 novembre, le parc éolien français atteignait une puissance de 20,4 gigawatts (GW) au troisième trimestre 2022. L’objectif du pays est d’atteindre 24,1 GW d'électricité éolienne d'ici fin 2023. Du côté du solaire photovoltaïque, la puissance atteint 15,8 GW, contre un objectif de 20,1 GW à fin 2023. Les écarts à combler restent donc importants. D’où l’importance d’accélérer… mais pas n'importe comment, préviennent les ONG.
"Pour avoir une vraie dynamique positive sur les énergies renouvelables, il est crucial qu’un projet de loi soit voté à l’Assemblée nationale, à condition que ce dernier soit à la hauteur des enjeux. Or pour l’instant, celui proposé doit être amélioré sur son ambition d’accélération", déplore le Réseau action climat dans un communiqué.