Pollution des paquebots de croisière : comment le secteur tente de reprendre la main

Publié le par Le Figaro via M.E.

Le monde de la croisière s'est réuni le 20 octobre à Marseille sous l'égide du secrétariat d'État à la Mer pour signer une charte l'engageant à limiter ses émissions polluantes. Suffira-t-elle à faire taire les critiques ? Le Figaro a pu la consulter en avant-première.

CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Le secteur de la croisière s'engage dans une charte à protéger l'environnement en Méditerranée française. (Ici le Costa Luminosa au port de Marseille, mars 2020.)

Selon le président de Clia France, la principale association de croisiéristes dans le monde, «il s'agit de construire une Méditerranée nouvelle». Rien que ça ! Sous l'égide du secrétaire d'État à la mer, Hervé Berville, le secteur s'est réuni le 20 octobre, à Marseille, pour signer une charte l'engageant à protéger l'environnement et la biodiversité marine en Méditerranée, sur toute la Zone économique exclusive française (86 212 km², au total). Soit un périmètre qui va de l'Occitanie à la région PACA et qui englobe la Corse.

Les croisiéristes étaient attendus au tournant, après les polémiques qui ont éclaté cet été autour de la pollution des paquebots sur nos côtes, de Cherbourg à la Corse. Exemple le plus retentissant : à Marseille, justement, où la mairie s'est fendue en août d'une pétition fustigeant les «bateaux qui salissent, qui crachent leur fumée sur nos rives en toute impunité». C'est dire combien cette signature est symbolique. Pour autant, le président de la Clia l'assure, cette initiative n'est «en aucun cas une réponse ponctuelle à l'hystérie actuelle. Nous en discutons depuis 18 mois.»

Un code de conduite en treize points

Cette charte, qui sera rendue publique dans la journée, dresse un code de conduite en treize points pour les navires frayant dans le sud de la France. Une partie du texte est consacrée à la protection des écosystèmes méditerranéens, avec des mesures concrètes pour protéger la faune et la flore. Une vitesse maximum de 13 nœuds est par exemple imposée lorsqu'un cétacé est détecté.

La deuxième partie, la plus conséquente, évoque directement la pollution des navires, leurs rejets et leurs émissions. Tri des déchets, interdiction de rejet des eaux usées, utilisation de produits biodégradables, réduction de la vitesse près des côtes... La règle la plus contraignante est probablement celle qui impose dès janvier 2023, d'utiliser un carburant au taux de soufre minimal (0,1%) dans un périmètre de 3 miles nautiques. Une limite qui sera étendue l'année suivante à toutes les eaux territoriales françaises, en anticipation de la zone SECA («zone de contrôle des émissions d'oxydes de soufre») qui doit être créée en 2025.

95% du secteur représenté

On pourrait être tenté de dire que ce texte enfonce des portes ouvertes, la plupart des compagnies appliquant déjà ces mesures. Les grands noms du secteur n'ont pas attendu la charte pour construire des navires plus «propres», hybrides ou propulsés au Gaz naturel liquéfié. Le premier bateau au GNL de MSC Croisières sera inauguré ce lundi à Saint-Nazaire. Royal Caribbean en fera de même début 2024. Elles trient déjà leurs déchets à bord et bannissent les plastiques à usage unique. Pour autant, elle a le mérite d'uniformiser les règles existant localement, et chez certains acteurs, à une large zone de la Méditerranée française et à tout un secteur. Rappelons que la Clia, qui est signataire, représente 95% des compagnies de croisière. Et, en tout cas, tous ses poids lourds - Royal Caribbean, MSC, Costa, Virgin Cruises ou Ponant.

«Cette charte établit un premier cadre robuste et des règles homogènes qui dépassent les clivages locaux et engagent tout un pays», résume Erminio Eschena. Il insiste aussi sur le fait, qu'en plus des compagnies, les ports méditerranéens sont impliqués, afin de créer de vraies «filières vertes» sur terre et en mer. «Car une croisière ne peut pas être green si le port ne l'est pas». Le maire de Marseille appréciera.

Une telle initiative pourrait-elle voir le jour sur d'autres littoraux, comme sur la façade Atlantique où les croisières font aussi débat, voire plus loin, dans les Caraïbes ? «Pour l'instant, ce n'est pas d'actualité car les enjeux sont différents. Rappelons que la Méditerranée est la première zone pour les croisières en Europe. C'est plus difficile ailleurs, car les réglementations ne sont pas aussi homogènes. Mais des discussions adaptées sont toujours possibles.»

Source : https://www.lefigaro.fr/voyages/nuisances-des-croisieres-comment-le-secteur-tente-de-reprendre-la-main-20221020

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