Molécule anti-Covid-19 : l'Institut Pasteur de Lille espère des résultats à partir de mai 2021
Mardi 1er décembre 2020 avait lieu la conférence consacrée au COVID-19 par l'Institut Pasteur de Lille. A cette occasion, le directeur scientifique de l'établissement est revenu sur la "molécule mystère" repérée par les chercheurs du site. Selon Benoît Déprez, elle va fait l'objet d'essais cliniques dont les résultats sont espérés à partir de mai 2021.
COVID-19 : l'épidémie à la loupe". C'était le titre de la conférence de l'Institut Pasteur de Lille (établissement indépendant du site parisien portant le même nom) qui s'est tenue le mardi 1er décembre 2020 au Grand Palais, dans la capitale des Flandres. Devant une salle vide (règle de distanciation physique oblige), mais la conférence était diffusée en direct sur YouTube et elle est visible ci-dessous), les scientifiques de l'établissement ont fait un point sur l'état de la recherche contre le SARS-CoV-2. Sur la question des traitements, il a évidemment été question de ce "traitement mystère" repéré par l'Institut Pasteur de Lille après un criblage de près de 2 000 molécules. C'est un exemple de "repositionnement", puisqu'il s'agit d'un médicament déjà employé dans le passé, mais dans un cadre bien différent de celui de l'épidémie de coronavirus. Les explications qu'a données à ce sujet Benoît Déprez, directeur scientifique de l'Institut, sont à retrouver ci-dessous :
"L'approche du repositionnement n'a pas été faite qu'à l'Institut Pasteur de Lille. (Au moins) 3 grands centres de recherche dans le monde ont eu cette idée, et qui avaient les moyens de la mettre en œuvre avec des collections de médicaments. Alors évidemment il ne s'agit pas d'aller dans une pharmacie, avec des boîtes, des gélules, des comprimés ; on est sur une présentation des principes actifs purifiés de ces médicaments dans de tous petits tubes à essais que l'on peut tester in vitro. Ces collections diffèrent d'un site à l'autre : à Lille on avait la chance d'avoir une collection un peu plus large, une collection européenne avec des produits qui ont des autorisations de mise sur le marché dans un ou deux pays européens, ou quelques zones géographiques dans le monde, quelques fois très petites. Et on a eu la chance de tomber sur une molécule qui est commercialisée dans un seul territoire et qui présente une activité antivirale in vitro dans tout un ensemble de tests (...) dans différents modèles de plus en plus sophistiqués, d'abord très rapides donnant une information basique, et ensuite beaucoup plus lents, beaucoup plus sophistiqués à mettre en œuvre et qui donnent une information plus complète sur l'activité du produit et la promesse que l'on peut en attendre en terme d'efficacité in vivo."
L'INTEGRALE. La conférence d'une heure est à retrouver intégralement ci-dessous. Vous pourrez y entendre la Pr Anne Goffar (virologue au centre d’infection et d’immunité de Lille, médecin au CHU de Lille, professeure de virologie à la faculté de pharmacie à Lille), la Dr Sandrine Belouzard (virologue et chercheuse CNRS au centre d’infection et d’immunité de Lille), le Dr Jean Dubuisson (directeur de recherche CNRS, directeur du centre d’infection et d’immunité de Lille), le Pr Benoit Deprez (directeur scientifique de l’Institut Pasteur de Lille) et le Pr Xavier Nassif (directeur général). Présentation par Olivier Lascar, rédacteur en chef du pôle digital de Sciences et Avenir.
L'Institut Pasteur de Lille a décidé de ne "pas donner le nom au public, mais nous l'avons partagé dans une partie de la communauté scientifique, puisque les différents laboratoires de recherche se parlent au niveau français, au niveau européen, donc quand il s'agit maintenant de tester la molécule en clinique, évidemment on partage cette information pour trouver les meilleurs partenaires (et) les meilleurs sites".
Pourquoi taire le nom du médicament ? "Le but est d'éviter que cette molécule ne soit utilisée chez l'Homme dans un contexte mal contrôlé et qu'au final on fasse courir un risque à ces personnes qui seraient en fait des cobayes (...) et de se donner toutes les chances de tester la molécule dans un essai clinique que l'on est en train de finir de concevoir, avec une méthodologie la plus robuste possible. C'est-à-dire en essai en double aveugle, contre placebo, dans lequel ni les médecins ni les patients se savent s'ils emploient le médicament ou un placebo qui ne contient pas le principe actif . Il s'agit de respecter au mieux et de la façon la plus rigoureuse possible la méthodologie scientifique, qui a été celle que nous avons utilisée depuis les tests in vitro jusqu'à maintenant".
"Nous avons un jalon particulier à court terme qui est celui d'obtenir l'autorisation d'essai clinique. (Actuellement) on décrit la méthodologie clinique, la méthodologie de l'essai, on la présente aux autorités, notamment l'Agence de sécurité du médicament en France, le Comité de protection des personnes, qui vont juger de la méthodologie et l'approuver, on l'espère, et une fois qu'on a cette autorisation, on peut commencer à inclure des patients, et là on va atteindre un deuxième jalon qui sera l'inclusion du nombre de patients nécessaires pour obtenir des résultats statistiquement significatifs. Cette date (est liée à la capacité de) l'enrôlement du nombre désiré de patients (qui) va dépendre de l'intensité de l'épidémie. Donc si on se retrouve en période de rebond de l'épidémie, le recrutement sera rapide, si on est dans une phase un peu plus basse il faudra être un peu plus patient pour recruter le nombre désiré".
"L'espoir c'est que le dernier patient serait inclus dans l'étude au mois de mai et une fois que la dernière visite, les dernières analyses seront faites sur le dernier patient, l'analyse des résultats qui seront tous stockés dans des bases de données électroniques sera extrêmement rapide et le résultat pourra être communiqué très rapidement".
Source : https://www.sciencesetavenir.fr/sante/molecule-anti-covid-19-objectif-mai-selon-pasteur-lille_149673