Coronavirus : le masque est trop peu porté en France, avertit le conseil scientifique
L'organisme qui conseille le gouvernement dans l'épidémie de Covid-19 estime qu'une reprise de l'épidémie est très probable en octobre-novembre, voire cet été si le relâchement des comportements se poursuit.
C'est l'été. Un nouveau palier a été franchi dans le dé-confinement , avec des protocoles moins sévères dans les entreprises et les collectivités, et une plus grande tolérance sur les rassemblements publics. Or à mesure que les Français se détendent, le conseil scientifique se crispe. L'organisme indépendant, créé en mars pour conseiller le gouvernement sur les mesures à prendre face au coronavirus, vient de voir son existence prolongée après quatre mois de travaux. Dans une visioconférence de presse organisée mercredi après-midi, son président Jean-François Delfraissy n'a pas caché son inquiétude, du fait du relâchement des comportements face au risque viral.
Les mesures barrières telles que le fait d'éternuer dans son coude ou les gestes de distanciation sociale comme le renoncement aux embrassades et le mètre d'éloignement sont de moins en moins respectés, a-t-il remarqué. « Au risque de paraître un peu niais, ce que je ne suis pas, je vais réinsister » : « Il ne faut pas croire qu'on va rester sur cet équilibre tranquille », « le risque de reprise de l'épidémie existe avant la fin de cet été », a alerté le professeur de médecine.
Interrogé sur l'opportunité de rendre obligatoire le port du masque à l'avenir, son collègue Franck Chauvin, membre du conseil et également président du Haut Conseil de la santé publique, a laissé entendre qu'il faudrait sans doute en faire plus dans ce domaine. « Le port du masque est la seule mesure connue réellement efficace. Il est probable qu'actuellement il n'est pas suffisant, par exemple dans les magasins », a déclaré Franck Chauvin. « A la rentrée, ce sera probablement un impératif de se protéger par un usage des masques beaucoup plus généralisé », a-t-il ajouté.
Mais pourquoi s'inquiéter, alors que l'épidémie régresse, avec moins de 100 hospitalisations par jour, moins de 10 entrées en réanimations, et un ralentissement des décès ? La France continue à vivre le scénario de déconfinement le plus favorable qu'ait envisagé le conseil scientifique , celui d'une maîtrise de l'épidémie grâce au contrôle des clusters et au dépistage massif. Toutefois, a estimé Franck Chauvin, « 500 cas diagnostiqués par jour, c'est suffisamment pour faire repartir une épidémie ». Jean Castex a d'ailleurs annoncé jeudi qu' un plan de reconfinement ciblé était prêt à l'emploi, au cas où.
D'ailleurs, la France n'est pas la seule à craindre une faille dans sa surveillance du virus. L'Espagne ou l'Angleterre ont dû prendre des mesures drastiques, telles qu'un re-confinement local à Leicester. De plus, la circulation virale n'est pas contrôlée dans des pays comme les Etats-Unis ou le Brésil, avec le risque d'une réimportation du virus en Europe à terme.
Les connaissances scientifiques n'ont cessé d'évoluer au fil de la pandémie, ce qui incite à la prudence. Il y a désormais un consensus pour dire que le virus peut demeurer présent longtemps en suspension dans les espaces clos, sous forme de micro-gouttelettes. La transmission est ainsi facilitée, à plus forte raison lorsque plusieurs personnes sont contaminées et « polluent » l'air en respirant. Auparavant, on pensait que seuls les postillons et les éternuements étaient contaminants.
Enfin, l'hypothèse d'un retour saisonnier du virus, à l'automne, a pris de l'épaisseur. Verra-t-on des clusters critiques, une montée diffuse, ou bien une nouvelle vague catastrophique ? « Il y a une très grande probabilité qu'à l'automne on assiste à l'un de ces scénarios en France », estime Franck Chauvin. Le virologue Bruno Lina, également membre du conseil scientifique, fait référence aux épisodes grippaux de 1918 et 2009, et précise que « si l'histoire se répète, on doit s'attendre à une reprise épidémique à l'automne », en « octobre-novembre en général », d'autant plus que les taux d'immunité collective dans la population française ou européenne sont « rarement supérieurs à 12-15 % ».
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