Coronavirus : 90 % des contaminations se produiraient de façon aéroportée dans les lieux clos et mal ventilés
Partager un espace confiné, mal ventilé pendant une ou plusieurs heures constituerait le dénominateur commun à la grande majorité des situations propices à la contagion du Coronavirus SARS CoV-2. Si la transmission du virus par les micro-gouttelettes à l’occasion d’une toux ou d’un éternuement est établie depuis le début de l’épidémie, un faisceau d’indices concordant laisse à penser que son transport aéroporté sous forme d’aérosols serait à l’origine d’un nombre tout aussi important de contaminations. Si les preuves formelles manquent encore, le principe de précaution devrait inciter les autorités sanitaires à revoir une fois de plus leur doctrine de port de masque.
Une étude publiée le 7 avril sur medRxiv a compulsé les données issues du registre des contaminations s’étant produites entre le 4 janvier et le 11 février 2020 dans 320 villes chinoises situées en dehors de la province de Hubei (alors partiellement mise en quarantaine à compter du 22 janvier).
7324 cas de contaminations étaient suffisamment documentés pour être inclus dans l’étude. Les auteurs ont défini un cluster comme un minimum de 3 contaminations qui se sont produites dans le même lieu durant une courte période de temps et un foyer épidémique comme l’ensemble des cas de contaminations ayant comme origine le même patient.
Sur les 318 foyers épidémiques qui ont pu être recensés :
- 53,8 % impliquaient 3 cas, 26,4 % 4 cas et 1,6 % dix cas ou plus.
- 79,9 % impliquaient le domicile des patients, 34 % les transports (un foyer peut être lié à plusieurs lieux de contamination)
- Un seul foyer impliquant deux cas s’est produit en extérieur
- Tous les foyers impliquant 3 cas ou plus se sont produits dans des lieux fermés.
Au vu des résultats obtenus, les auteurs positionnent le partage d’un espace clos comme un facteur de risque majeur de contamination du coronavirus.
Ces données semblent confirmées par une autre étude sur 110 cas japonais qui suggère que les environnements clos contribuent de façon prépondérante à la transmission secondaire du Coronavirus. Selon les auteurs, les risques de contaminations dans un environnement intérieur étaient 18,7 plus élevés que dans un environnement extérieur (95 % [IC] : 6,0, 57,9)
Erin Bromage est professeur agrégé de Biologie à l’université Dartmouth dans le Massachusetts aux États-Unis. Il y donne des cours sur les maladies infectieuses et l’immunologie. Dans un long billet publié sur son blog, il explique que 90 % des chaines de contaminations auraient été initiés dans des lieux clos et mal ventilés où une forte densité de personnes est maintenue pendant plusieurs heures.
Pour étayer son propos, il passe en revue les principaux cas de « super » foyers épidémiques qui se sont produits en dehors des hôpitaux ou des EHPAD comme autant de situations à risque contre lesquelles se prémunir à la sortie du confinement.
Près de 5 000 cas de contamination se sont produits aux États-Unis dans 115 usines de conditionnement de viande au 1er mai 2020 selon le CDC américain. Dans ces usines où les chambres froides sont propices à la conservation des virus, les ouvriers sont très proches les uns des autres et doivent communiquer régulièrement de façon rapprochée pour couvrir le bruit des machines. Pour le CDC, si les distances sociales ne peuvent être respectées du fait de l’organisation du travail sur les lignes de production, le port de masque de protection respiratoire, une désinfection régulière des chaines de production et une hygiène des mains irréprochable sont d’autant plus nécessaires.
La conférence organisée par Biogen du 26 au 28 février à Boston réunissait 175 cadres sur le thème du leadership. Au programme des conférences, de nombreux entretiens informels, mais aussi des petits déjeuners et de longs repas d’affaires ponctués de cérémonies avec remises de récompenses incluant accolades, embrassades et toasts multiples. Autant d’occasions de voir confinée dans un même lieu une forte densité de personnes. Il n’aura fallu que deux jours pour que 2 de ces 175 cadres qui revenaient d’Italie ne contaminent pas moins de 70 de leurs collègues, soit plus des trois quarts des cas enregistrés dans l’état du Massachusetts à la date 13 mars 2020.
Pour le CDC américain, il s’agit d’un des principaux foyers à l’origine de l’épidémie aux États-Unis avec les célébrations du Mardi gras en Louisiane ainsi qu’une cérémonie funéraire ayant regroupé une centaine de personnes en Georgie.
Dans son blog Erin Bromage précise que 10 % des foyers épidémiques se sont produits à l’occasion de mariages, d’enterrements et d’anniversaires.