Fermeture de Fessenheim : une bonne nouvelle et un bal de contre-vérités
Un communiqué de France Nature Environnement.
Enfin ! Samedi, le premier réacteur de la centrale nucléaire de Fessenheim va fermer. France Nature Environnement se réjouit que cette promesse, ressassée depuis des années, devienne une réalité. Un premier petit pas indispensable pour la sécurité sanitaire et environnementale de la France. Notre fédération est cependant effarée de constater à quel point le lobby pro-nucléaire se répand en mensonges pour commenter une fermeture pourtant d’utilité publique. Mise au point.
Des déchets nucléaires qui restent radioactifs plus de 100 000 ans. Des mines d’uranium, exploitées au Niger pour les centrales françaises, qui contaminent l’eau de la population locale. Une climato-compatibilité largement surestimée. Des accidents nucléaires, de Tchernobyl à Fukushima, aux effets sanitaires et environnementaux terrifiants. La liste des méfaits du nucléaire sur notre santé et les écosystèmes est particulièrement abondante. Elle rappelle à quel point cette énergie n’est et ne sera jamais humainement et écologiquement viable.
Pourtant, la fermeture d’un seul réacteur de la centrale de Fessenheim est à l’origine d’un impressionnant flot de contre-vérités. « Faute écologique », « crime contre l’environnement », « aberration écologique » … ce bal s’insurge au nom du climat. Pour des « anti-Greta Thunberg » déclarés, le climat serait enfin devenu l’urgence. Seulement l’argument se révèle faible. L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) a évalué qu’on éviterait à peine 9% d’émissions de gaz à effet de serre en mettant en service 1 réacteur nucléaire par semaine pendant... 15 ans. A contrario, un scénario énergétique 100% renouvelable en France d’ici 2050 est réalisable et climato-compatible d’après les études prospectives de l’ADEME.
« Hors de prix, polluante, dangereuse, productrice de déchets que nous sommes incapables de gérer, s’adaptant mal au réchauffement climatique : l’énergie nucléaire n’a rien d’une solution, il est plus que temps de reporter les investissements dans les économies d’énergie et les énergies renouvelables, ce sont elles qui sauveront le climat ! », résume Adeline Mathien, coordinatrice du réseau Energie de France Nature Environnement.
Autre mensonge répandu par le lobby pro-nucléaire : la centrale de Fessenheim serait sans danger. Mise en service en 1978 pour une durée de 40 ans[1], elle est aujourd’hui, avec plus de 43 ans d’âge, la plus vieille centrale nucléaire encore en activité en France. Selon la liste de l’ASN, obtenue par Mediapart en 2018, c’est l’une des centrales cumulant le plus de dysfonctionnements qui viennent « augmenter le risque de fusion du réacteur ». Pour certaines pannes et incidents, EDF a également été condamnée. Son état de vétusté est tel qu’une mise aux normes post-Fukushima n’est pas possible. Et ses faiblesses sont d’autant plus risquées que la centrale est située sur une zone sismique, sous le niveau du grand canal d’Alsace. Son radier (ses fondations) est pourtant l’un des plus fins de l’hexagone… Pour la sécurité de l’ensemble du territoire et de ses habitants, il est plus que temps de fermer cette centrale.
Le lobby pro-nucléaire met en avant l’impact économique de cette fermeture pour le territoire, avec ses 2000 emplois liés à la centrale. Cet argument omet pourtant une donnée de taille : une fermeture de centrale va durer, en étant très optimiste, une vingtaine d’années. Pour comparaison, le démantèlement de la centrale de Brennilis, commencé en 1985, devrait au total prendre 47 ans… Un tel chantier nécessite aussi de mobiliser des compétences encore timides dans le monde, ainsi qu’une connaissance du site et une mémoire des incidents. Il est urgent d’opérer ce virage, puisque EDF dispose d’un personnel recruté massivement il y a 40 ans, qui part aujourd’hui à la retraite à un rythme soutenu : près de 5% par an en moyenne nationale.
Plusieurs pays ont déjà annoncé leur sortie du nucléaire et une quinzaine de centrales devront être démantelées d’ici 2035 pour respecter la loi Energie-Climat de 2019. Être le premier peut être une formidable opportunité. Pour Arnaud Schwartz, administrateur d’Alsace Nature et secrétaire national de France Nature Environnement : « Il faut transformer Fessenheim en chantier-école du démantèlement, former les ingénieurs français et ainsi anticiper l’émergence d’un marché. Ce savoir-faire de la déconstruction représente l’avenir de la filière nucléaire française. »
Michel Dubromel, président de France Nature Environnement, conclut : « Nous saluons la décision de fermeture de ce premier réacteur et invitons le gouvernement à aller plus vite et plus loin en inscrivant dans la Programmation Pluriannuelle de l’Energie une trajectoire de fermeture systématique des réacteurs avec mise à l’arrêt définitif et démantèlement dès que leurs cuves atteignent les 40 ans. »
[1] La durée de vie d’un réacteur dépend de la durée de vie de sa cuve, soumise à de fortes irradiations, et irremplaçable. Celle-ci a été définie à 40 ans : au-delà, nous ne connaissons pas les risques encourus.
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